Au Coeur de la Littérature
« Boubous - Hors clichés » de Mariama Baldé

Mariama Baldé
Photo (détail) : Stéphanie Nikolaidis

Si les innovations permettent d’aller de l’avant, c’est que « Au cœur de la littérature » est sur les sentiers du soleil levant. Ce 15 Décembre 2015 a été un jour particulier, qui a su lier plusieurs activités sous la bannière de la rencontre littéraire mensuelle. Mariama Samba Baldé, a présenté son film documentaire Qui suis-je sans mari ? et son livre Boubou - Hors clichés.

Le film documentaire Qui suis-je sans mari ? est un film très instructif de 52 minutes, qui s'attaque aux différents tabous qui existent autours des valeurs du mariage, du célibat et de la polygamie. Il évoque le manque de considération dont sont victimes les femmes célibataires au sein de la société sénégalaise.
Cette œuvre de Mariama Baldé interroge la question du regard et pause la question du respect et de l'honneur au sein de notre société. Après le film, la rencontre était désormais consacrée à la présentation du très beau livre Boubou - Hors clichés.
Autour de l'auteur il y avait les modératrices Bouya Fall dans un très beau tissu africain bleu et Binta Ndiaye, elle aussi dans un boubou tout blanc.

Son livre Boubou - Hors clichés montre à quel point un regard porteur de préjugés peut accoucher de paroles racistes et du mépris de l'autre. C'est en entendant un député français déclarer que voir Ségolène Royal en boubou lui rappelait sa femme de ménage et que cette tenue ne reflétait pas l'image «d'une femme politique d'envergure», que Mariama Samba Baldé s'est lancée dans la réalisation de cet ouvrage où le boubou conduit à un voyage entre la France et l'Afrique, voyage censé déconstruire certains stéréotypes.

Elle estime qu'il est important de traiter l'autre avec considération, pour éviter toute sorte de collision. Elle reprend Amadou Hampaté Ba qui comparait la vérité à une pleine lune dont chacun ne possède qu'une partie et que c'est ensemble qu'il est possible de reconstituer la lune entière, « ce que j'ai constaté de dégradant dans la perception de l'homme noir en Europe m'a amené à produire cette œuvre ».

Ce livre qui aborde une multitude de question dont les réponses existent en chacun de nous, « je pense qu'il est parfois important de laisser aux gens l'opportunité de lire entre les lignes », souligne Mariama Baldé.

Mariama Baldé est sénégalo-guinéenne, son identité fait croire qu'elle était prédestinée au métissage, à la rencontre « je pense qu'il est important d'apprendre à se rencontrer ». Elle a une organisation qui porte le nom de « Vibramonde », et une maison d'édition «Paroles Tissées » qui a publié son livre et qui a pour but de briser et déconstruire les clichés.

Son livre présente un éventail de corps de métiers en boubous traditionnels. Mariama a voulu briser l'image méprisante que l'occident a rattachée aux boubous, pour redonner la valeur et la noblesse de ce vêtement qui est aussi un symbole de générosité dans nos sociétés. A travers ces multiples de portraits d'africains vivant à la fois en Afrique et dans la diaspora, l'auteur a avec des outils dérisoires tels qu'une plume et un appareil photo, fait l'effort d'inviter au voyage pour rétablir le respect de l'autre simplement parce que la seul chose qui compte c'est d'agir dans un esprit d'unité, pour retrouver les rails de l'humanité.

Mariama Ndoye (ancienne Directrice du Livre et de la Lecture), une des initiatrices du café littéraire 'Au cœur de la littérature ', présente à cet évènement, a félicité l'auteur pour la pertinence de ses œuvres et a estimé que l'homme est indispensable dans la vie d'une femme. Un journaliste de la RTS a ensuite salué le travail de l'auteur et surtout la suite dans les idées, la pertinence des intervenants tout en rappelant qu'aucune œuvre n'était infaillible.
Un autre intervenant a, par contre, estimé que dans nos sociétés, les hommes vivent les mêmes souffrances que les femmes mais qu'en plaçant la femme dans une posture de victimisation, on rate la question fondamentale, « il y a la question du respect qui est plus que déterminante, en voulant combattre les clichés, on tombe dans d'autres clichés », il reprend ensuite l'auteur Boubacar Boris Diop qui précise: « être africain c'est déjà difficile mais être africain et noir c'est encore plus difficile dans ces pays qui se disent égalitaires ».
Un autre intervenant a rappelé que les politiques africaines n'ont pas tendance à aller vers l'égalité « la vie de la femme est une éternelle soumission à l'homme, d'abord sous l'autorité du père et ensuite sous l'autorité du mari ».

L'auteur va terminer en disant : « il y a des situations d'injustices qu'il faut absolument refuser, qu'on soit un homme ou une femme, un blanc ou un noir, nous avons tous besoin d'être traité dans la dignité et le respect pour l'équilibre de l'humain».

L'évènement va être clôturé par un très beau défilé de la créatrice Marie Madeleine Diouf de 'Nunu Design By Dk', qui a présenté une belle collection de boubous traditionnelles pour hommes et femmes, sous un fond musical du très grand Salif Keita.