Au Coeur de la Littérature
Rawane Diop : De l'indépendance à l'émergence
La rencontre littéraire de ce 29 juillet a été très marquante, d'abord par le contenu de l'œuvre mais surtout par la pertinence de sa présentation. Cette œuvre est un joyau littéraire de Rawane Diop intitulé «De l'indépendance à l'émergence, leurres et lueurs», qui plonge le lecteur dans un bilan alarmant de notre pays de l'indépendance à nos jours.
C'est une prestation de Slam de Kemit qui va ouvrir les hostilités et planter le décor. Suite aux acclamations, la parole revenait désormais à l'auteur, qui était bien installé aux cotés des modérateurs Bouya Fall et Oumar Ndiaye. Ancien inspecteur du Trésor, Rawane Diop est un enseignant et un écrivain qui, à un moment de sa vie a décidé de s'exiler pour découvrir d'autres réalités. L'idée de ce livre est née du constat profond de l'auteur de la stagnation du pays depuis les indépendances «j'ai écrit ce livre pour être solidaire à mon peuple».
Selon l'auteur, pour construire un pays, il faut nécessairement être à l'écoute de sa population, mais surtout mettre en avant les compétences et les valeurs endogènes pouvant servir à l'éclosion du pays. Pendant des années, les prêts de la banque mondiale ont empoisonnés plusieurs Etats africains, l'éducation qui constitue un secteur clé de l'économie a bien souvent été méprisée: «Dans un pays où tout se négocie, il est difficile de réprimander». Le Sénégal est riche de sa diversité mais ses choix politiques sont à l'origine de son retard «Ici, les mythes sont plus grands que la réalité ».
Lorsque Bouya Fall demande à l'auteur son analyse sur la gestion politique des différents présidents du Sénégal, il répond: «Au regard de son mandant présidentiel, Senghor a échoué, il n'a réussi qu'à pérenniser la colonisation; Mamadou Dia était le Sankara du Sénégal, mais tout a été mis en place pour qu'il soit effacé des mémoires. Abdou Diouf, au bout de 20 ans de pouvoir, a laissé un pays non construit. Abdoulaye Wade par sa largesse à favoriser le sentiment de mépris de la population mais il a construit le pays, il a eu beaucoup de bonnes idées pour ce pays, à l'instar de la rupture avec la France pour diversifier les partenaires, même si cet élan de liberté a pris fin en 2012».
Le peuple qui doit être l'acteur principal du développement semble être ignoré à travers les orientations politiques de nos différents présidents. C'est par la production qu'on parvient à développer un pays: «avoir sa monnaie renforce le sentiment d'être libre». Les contrats d'exploitation de nos terres que les dirigeants signent pour 50 ans sont «une colonisation voulue». Quant au problème de l'énergie, selon l'auteur, il peut être résolu par le solaire et par d'autres technologies modernes. L'auteur poursuit son argumentaire en disant que: «l'émergence ne se décrète pas mais se prépare, le changement de comportement est un véritable préalable». Un des participants a ajouté «il faut travailler et épargner pour émerger». Les problèmes de nos pays sont souvent liés aux élites, qui veulent tous les privilèges. «Pour être un président réformateur, il ne faut pas se soucier du second mandat ». L'auteur terminera par ceci «Il faut réinventer la république pour l'adapter à nos réalités. Le système éducatif doit être conforme aux besoins du pays, tout en pratiquant la religion sans excès pour réconcilier la société avec sa dignité».