La crise climatique, une crise sociale
Réfugiés climatiques
Chaque année, non moins de 20 millions de personnes sont contraintes de quitter leur pays en raison du changement climatique. Or, les migrants touchés ne bénéficient d’aucun droit réel à l’assistance juridique. C’est donc une véritable crise sociale à laquelle on assiste, crise qui touche en première ligne ceux qui sont le moins responsables des retombées du dérèglement climatique.
De Carmen Huidobro et Belén Hinojar
1.Ces grands inconnus
Réfugiés climatiques, exilés environnementaux, ou encore « écoréfugiés », ainsi qualifie-t-on les victimes de l’une des conséquences les plus dramatiques, si ce n’est des plus visibles, de la crise environnementale déjà amorcée. En tant qu‘activistes, c’est une chose que nous ne pouvons ignorer, et il est de notre devoir de prendre pleinement conscience du fait que la crise climatique présente, en réalité, toutes les caractéristiques d’une crise sociale.Le terme réfugié climatique désigne les victimes d’une émigration subie suite aux dégradations environnementales causées par le changement climatique. Inondations, sécheresses et formation de déserts comptent parmi les modifications climatiques en cause. D’après le calcul réalisé en 2020 par l’Organisation Internationale pour les migrations (IOM), plus de 98 pourcents des 30,7 millions de migrations comptabilisées seraient liés à des causes environnementales. L’UNHCR (Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés) évalue quant à lui le nombre moyen de personnes contraintes de fuir leur pays pour raisons climatiques à environ 20 millions. Le diagramme ci-dessous, publié dans le quotidien El País, répertorie les différents types de migrations et leurs raisons.
Source: https://elpais.com/sociedad/2019/12/03/actualidad/1575399365_095982.html | © IDMC
2.Un manque global de protection
Notre entretien avec Fransisco Rojo, membre de Accem, une ONG espagnole chargée de soutenir les réfugiés et les personnes les plus vulnérables, nous a permis de mieux cerner la situation. Le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières (conclu par l’Assemblée générale des Nations Unies), reconnaît l’existence de « mouvements migratoires » provoqués par les catastrophes naturelles et les effets négatifs du changement climatique. Il engage les signataires à minimiser tant que faire se peut les facteurs structurels à l’origine des mouvements migratoires énoncés. Aucun statut légal n’est toutefois conféré aux migrant.e.s, le pacte ayant pour seule fin d’atténuer les facteurs climatiques à l’origine de l’expatriation des populations concernées.3.En quoi l’activisme peut se révéler utile
D’après Fransisco, « aucune des personnes rencontrées dans le cadre d’Accem n’ont justifié de leur droit à l’aide juridique pour migration d’origine climatique. Il n’y a pour autant aucun doute sur le fait que les migrants, pour la plupart, quittent leur pays dans l’espoir d’une vie meilleure. Bien qu’ils ne le reconnaissent pas directement, il est probable qu’ils aient quitté leur pays d’origine à cause des répercussions du dérèglement climatique sur leurs conditions de vie, pouvant les empêcher de trouver du travail. Ceci expliquant du même coup qu’ils soient contraints d’émigrer.Toujours est-il que cette situation est aujourd’hui source d’une injustice majeure. En effet, les populations les plus touchées sont, a contrario, celles qui ont le moins contribué au rejet d’émissions de gaz à effet de serre. D‘après une étude d’Oxfam Intermón, la probabilité que des personnes originaires d’Inde ou de Somalie aient dû fuir leur pays pour des raisons climatiques est quatre fois plus élevée que dans le cas de populations ressortissant de pays à fort PIB tels que l’Espagne ou les Etats-Unis.
Une chose est sûre : la part des personnes contraintes à l’exil climatique ne va pas aller en diminuant. Il nous revient donc d’encourager les gouvernements à agir en faveur des populations vulnérables, d’une part, afin qu’elles bénéficient d’une véritable protection juridique, et des organisations engagées dans cette cause, d’autre part – l’objectif étant de les rendre plus visibles, de leur consacrer du temps ou de les soutenir financièrement…, sans oublier la sensibilisation essentielle qui doit éveiller les consciences sur les retombées décisives du changement climatique pour l’être humain dans le présent et dans le futur.
Tel est l’objectif du mouvement „Pass-The-Mic », dont notre collaboratrice belge, Lola, fait le rapport dans le dernier article de cette édition : l’idée est de donner une voix à ceux qui ne sont pas écoutés, comme c’est le cas des dénommés MAPA (Most Affected People and Areas/populations et zones les plus affectées).
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