Profils urbains : Bonn
Qui a dit que Bonn était un désert ?
Ludwig van Beethoven parmi 700 de ses doubles : cette installation artistique a été érigée à l’occasion du 250è anniversaire de la naissance du compositeur. | Photo (détail): © picture alliance / Sven Simon
Bonn vit-elle à l’ombre de Cologne ? Se trouve-t-elle en pleine crise d’identité ? Notre auteure Leoni Gubela montre ce qui rend la ville de Bonn unique et pourquoi certains postulats sont à revoir.
De Leonie Gubela
Cerisiers en fleurs et pavés
Des arcades tout en rose : la vieille ville de Bonn quand les cerisiers sont en fleurs. | Photo (détail): © Adobe La vieille ville de Bonn, ce sont des dédales de ruelles, des bâtisses de l’époque du Gründerzeit (ndt : au 19è siècle, période de l’industrialisation), des bars, des ateliers. Quelque part entre la mi-avril et la fin mai, elle est en ligne de mire des utilisateurs d’Instagram quand, le long de la Heerstraße, de nombreux cerisiers fleurissent en formant des arcades de fleurs roses. Pour les photographes en mal de compétition, il existe des concours de fleurs de cerisiers (qui ne veut rater en aucun cas le petit créneau de floraison, peut même s’abonner à une newsletter). En dehors cette saison rose, on compte parmi les multiples attractions, les copieuses pizzas du restaurant Tuscolo près de la piscine du Frankenbad ainsi que le musée de la femme. Loin du vacarme, on retrouve le calme en allant vers le Vieux Cimetière, avec ses tombes penchées couvertes de mousse.Beton für Bonn
Le planchodrome de Bonn dans la Rheinaue. | Photo (détail): © Beton für Bonn Pendant quatre ans, l’association Subculture Bonn, dans le cadre de son projet Beton für Bonn (Du béton pour Bonn) a organisé des événements, des tombolas, des concerts, la vente de marchandises et s’est démenée auprès d’investisseurs. À l’été 2018, tout était prêt : le premier planchodrome de Bonn ouvrait ses portes dans la Beueler Rheinaue. Jusque là, il n’y avait qu’une seule rampe, sur l’autre rive du Rhin, mais les débutants ne pouvaient s’y risquer. Les membres de Subculture souhaitaient quelque chose de plus grand pour la ville, aussi pour que les amateurs de planches à roulettes ne soient plus contraints de se rendre dans les environs.Hofgarten et bonbons gélifiés
Même si la grande mode de Harry Potter est terminée, à Bonn, on continue de jouer au quidditch dans le Hofgarten. | Photo (détail) : © picture alliance/dpa/ Volker Lannert Des étudiant.e.s qui dorment entre deux slacklines tendues (sangles élastiques pouvant être fixées entre deux arbres), deux ou trois individus jouant de la guitare et, au fond, l’équipe locale de quidditch s’entraînant à côté du club Ultimate-Frisbee. Le Hofgarten (littéralement « jardin de la Cour », qui s’étend devant le bâtiment principal de l’université, ne pourrait montrer plus d’insouciance lors d’une banale journée d’été. Cet espace de détente, qui appartenait jadis à la résidence du prince-électeur Clément-Auguste, a toutefois une histoire mouvementée derrière lui.Juste après la Seconde Guerre mondiale, le site fut utilisé comme camp de transit pour les prisonniers de guerre libérés. Plus tard, alors que la ville était le siège du gouvernement fédéral, des centaines de milliers de personnes s’y retrouvaient toujours pour manifester. Par exemple contre les lois de 1968 relatives à l’état d’urgence ou, au début des années 1980, contre la double décision de l’OTAN. Aujourd’hui, on s’y détend, on s’y promène et on y deale la nuit, dit-on. Probablement pas avec des oursons gélifiés (« Gummibärchen ») car on les trouve de façon tout à faite légale, à quelques pas du Hofgarten, dans le tout premier magasin Haribo de la République fédérale. Et les enfants savent bien ce que représente le « BO » de Haribo (pour ceux ou celles qui ne vivent pas à Bonn, le mot est issu du nom du créateur, HAns RIegel de BOnn).
Camping de luxe dans l’entrepôt
Le camping en intérieur, un camp de base. | Photo (détail) : © Basecamp L’entrepôt de Bonn-Dottendorf s’adresse à tous ceux qui trouvent le camping-car très confortable, mais sont incapables d’utiliser des réchauds de camping, des cabines de WC Dixi et de vivre dans la nature. Sur ce terrain de camping en intérieur, on trouve plus d’une douzaine de caravanes rétro entièrement rénovées et au design insolite. Des groupes de voyageurs peuvent louer d’anciens wagons-lits de la Deutsche Bahn. Tout comme à l’hôtel, les hôtes, à hauteur de 120 personnes max., disposent tous les jours d’un buffet pour le petit-déjeuner et les lits sont faits chaque matin. Et il est même possible de s’y marier ! À condition que les jeunes mariés ne trouvent pas trop kitsch les photos des Caraïbes affichées sur les murs de l’entrepôt !Politique d’hier et d’aujourd’hui
Les puits de lumière du Musée des Beaux-arts de la République fédérale (Kunst- und Ausstellungshalle der Bundesrepublik Deutschland). | Photo (détail): © picture alliance/ imageBROKER/ Karl F. Schöfmann L’histoire allemande de l’après-guerre a rarement été aussi bien mise en scène et racontée avec une telle intensité qu’à la Maison de l’Histoire de la République fédérale (Haus der Geschichte Bonn). En l’espace de quelques minutes, on y parcourt des décennies en pénétrant dans la soute d’un bombardier de ravitaillement (« Rosinenbomber » utilisé pendant le pont aérien de Berlin), en passant devant un siège pliant, vert et capitonné, du Bundestag dans les années 1950 ou en se glissant dans la réplique d’un cinéma pour visionner une brève présentation du film Grün ist die Heide. On peut poser sa main sur le béton glacé du Mur de Berlin, grimper sur une rampe abrupte qui monte vers la lune.La Maison de l’Histoire fait partie d’un ensemble de cinq musées de Bonn. Ils se trouvent sur la Bundesstraße 9 et s’intéressent respectivement à l’histoire naturelle (Museum König), à l’Histoire (Haus der Geschichte), à l’art (Kunstmuseum Bonn), et encore à l’art (Bundeskunsthalle) et à la technique (Deutsches Museum). De l’autre côté de la route B9, il y a le site des Nations Unies, siège de l’organisation internationale en Allemagne. La vie politique actuelle et la vie politique passée sont donc présentes à Bonn, en parallèle, séparées seulement par une route à quatre voies.
Viva Viktoria !
Non au centre commercial : le collectif « Viva Viktoria ! » a lancé un mouvement citoyen, qui a obtenu gain de cause, contre les projets de construction. | Photo (détail) : © Bonn im Wandel Pour cerner la beauté du quartier Viktoria, il faut y regarder de plus près. On ne les voit presque pas en passant mais on peut admirer de petites mosaïques colorées qui entourent les entrées des boutiques du quartier, ou bien les fenêtres en résine synthétique de la piscine Viktoria, désormais fermée au public. Le quartier, avec ses bâtiments des années 50 et 60, relie le centre ville au Hofgarten. La Ville a annoncé il y a quelques années qu’elle voulait vendre certains biens à un investisseur autrichien. Celui-ci prévoyait de son côté sur ces terrains la construction d’un centre commercial et d’une bibliothèque universitaire. Ces projets déclenchèrent la vive consternation des habitant-es et l’association citoyenne Viva Viktoria !, qui avait pour slogan « Conserver plutôt qu’exploiter », organisa des fêtes de quartier et fut à l’origine, fin 2015, d’un mouvement citoyen. Et ce fut un succès. Plus question de centre commercial désormais ! On ne sait toutefois pas encore clairement dans quelle ampleur il faudra réaménager le quartier.Tours de chute et ruines médiévales
Vue sur le château de Drachenburg : le Rocher du dragon (Drachenfels) est un lieu d’excursion très apprécié dans le massif montagneux des Siebengebirge. | Photo (détail): © Adobe Depuis Bonn, on a la possibilité de remonter ou de descendre le Rhin et il faut s’attendre à découvrir des paysages très différents d’une rive à l’autre. Si en aval le chemin est parsemé d’usines chimiques, d’une raffinerie de pétrole et du parc de loisirs Phantasialand, commence en amont le massif des Siebengebirge, dépourvu de toute cheminée d’usine ou de tours de chute. En revanche, on peu voir de ce côté d’authentiques ruines de châteaux médiévaux et de nombreuses illustrations du romantisme rhénan. Le Drachenfels (Rocher du dragon), situé entre Königswinter et Bad Honnef, à 320 mètres de hauteur, est ici le lieu d’excursion favori et, si l’on en croit la légende, l’ancien refuge d’un monstre. Un dragon se serait installé là il y a des siècles pour terrifier la population de la vallée du Rhin.Elle devait chaque année sacrifier une jeune fille pour calmer l’animal jusqu’au moment où Siegfried (celui de la Chanson des Niebelungen) arriva sur son cheval et tua la bête avant de se baigner dans son sang. Toutes les traces laissées par cet épisode ont certes été effacées depuis, mais le Rocher est devenu un lieu apprécié, tant pour les congrès que pour la peinture de paysages. On peut y accéder par le plus vieux train à crémaillère d’Allemagne ou à dos d’âne. Une fois arrivé en haut, on peut même voir, par beau temps, la cathédrale de Cologne.
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