« Double Exposure » est un projet des Goethe-Instituts d'Amérique du Nord qui s'intéresse aux questions de solidarité qui transcendent les frontières identitaires, nationales, ethniques et linguistiques. Avec cette série de films, nous souhaitons nous tourner vers l'ambiguïté, les homophones et les dissonances, ainsi que vers la cohérence dans la diversité.
La double ou multiple exposition est un processus en photographie au cours duquel deux ou plusieurs prises de vue individuelles se superposent pour former une image commune. Cette superposition transparente - à la différence du photomontage, les motifs superposés ne sont pas opaques, mais apparaissent transparents - crée une nouvelle signification. Et pourtant, chacune des images superposées porte en elle la trace de son propre contexte de création. Ce ne sont donc pas seulement deux motifs qui se fondent et se superposent, mais aussi deux contextes d'origine. L'interférence crée donc quelque chose de nouveau - les images s'enrichissent - mais des détails des images individuelles peuvent également être superposés, effacés ou neutralisés.Double Exposure est un projet des Goethe-Institut d'Amérique du Nord sur les questions de solidarité, plus précisément les questions d'une solidarité qui dépasse les frontières identitaires, nationales, ethniques et linguistiques, sans toutefois les ignorer ni même les dénoncer. Qu'est-ce qui caractérise une société solidaire ? Existe-t-il un droit à la solidarité ? La solidarité est-elle un devoir ? À l'égard de qui la solidarité s'exerce-t-elle ?
Le mot « solidarité » vient du latin et signifie « appartenance ». En partant du contexte photographique établi ci-dessus, la solidarité doit être comprise ici comme un concept d'interférence avec la superposition comme élément inhérent. Dans un monde qui semble de plus en plus confus, où nous sommes connectés à l'échelle mondiale comme jamais auparavant dans l'histoire, où nous consommons en ligne des images de catastrophes écologiques et de crimes de guerre, suivies de compilations TikTok de clips de chats tous plus mignons les uns que les autres, il s'agit ici très explicitement de simultanéités et de complexité.
Ce cycle de films souhaite délibérément se pencher et travailler sur la polycontextualité (tous les phénomènes sont simultanément situés dans des contextes différents, souvent contradictoires) et l'intersectionnalité (chaque phénomène est le point de croisement et de superposition de caractéristiques qui se renforcent ou s'atténuent mutuellement). À l'encontre des courants antisolidaires, des clivages sociaux et des messages de salut simplistes des populistes conservateurs de droite des deux côtés de l'Atlantique, il s'agira ici de s'intéresser à l'ambiguïté, aux consonances et aux dissonances ainsi qu'à la cohérence dans la diversité.
Simultanéités et surexpositions historiques
Trümmermädchen - Die Geschichte der Charlotte Schumann (traduction littérale: Les filles des ruines – L'histoire de Charlotte Schumann) (2021) est une étude punk, furieuse et délibérément anachronique de l'Allemagne de l'heure zéro sous l'angle féministe. Son auteur, Oliver Kracht, y jette un regard courageux, contemporain et déconstructif sur l'après-guerre dans ce pays. Il ne s’attarde pas uniquement sur la génération qui a construit et porté les deux États allemands et dont les valeurs résonnent encore aujourd'hui, mais il pose également des questions très actuelles sur les structures de pouvoir patriarcales, en plus d'imaginer des solutions parfois radicales.
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Dans son documentaire Black Box RFA (2001), Andres Veiel oppose deux hommes que tout sépare : d'un côté, Alfred Herrhausen, le président du conseil d'administration de la Deutsche Bank dans les années 1980 et l'un des hommes les plus puissants d'Allemagne, qui a perdu la vie en 1989 dans un attentat à la bombe, et de l'autre, Wolfgang Grams, membre du groupe terroriste Fraction armée rouge. Les recherches de Veiel le ramène à l'implication des Allemand.e.s dans le national-socialisme et aux débuts de l'histoire de la République fédérale. Les deux personnages, Alfred Herrhausen et Wolfgang Grams, représentent de manière exemplaire deux parcours de vie opposés, dont les conditions et les formes sont mises en lumière par Andres Veiel.
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Consonances et assonances
Quelle image avons-nous de Berlin et dans quelle mesure notre propre expérience est-elle influencée par les images que nous nous sommes faites de cette ville dans les campagnes publicitaires et sur les réseaux sociaux ? Qu'est-ce que la subculture au juste et comment la musique des travailleurs immigrés en Allemagne peut-elle être intégrée dans l'histoire musicale du pays ? Basé sur le film Berlin, symphonie d'une grande ville (1927) de Walter Ruttmann, Symphony of Now (2018) de Johannes Schaff présente, environ 90 ans plus tard, un kaléidoscope contemporain de Berlin à son apogée en tant que capitale internationale de l'hédonisme. Porté par une bande-son dynamique (Frank Wiedemann, Modeselektor, Hans-Joachim Roedelius entre autres), ce film, constitué de vignettes rapidement montées les unes après les autres, est une iconisation prototypique de la vie nocturne de cette grande ville sous toutes ses facettes. Le film célèbre avec une légèreté insouciante la simultanéité de la haute culture et de l'underground.
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En 1961, l'accord de recrutement avec la Turquie a fait entrer en Allemagne la musique des travailleurs immigrés. Le documentaire-essai dense de Cem Kaya, Liebe, D-Mark und Tod (L’amour, le Deutsche Mark et la mort) (2022) est une leçon d'histoire contemporaine turco-allemande : emplois à la chaîne, mal du pays et regroupement familial. Sa musique s'est développée loin de la société majoritaire allemande, toujours portée par la communauté turque et ses besoins.
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Revisiter le « Denkmal »
Goethe était-il gai ? Heinrich Heine a-t-il posé la première pierre de l'homophobie socialement acceptée en insultant publiquement son collègue poète August Graf von Platen ? Pourquoi y a-t-il tant de tableaux de femmes nues au musée, mais si peu de tableaux d'artistes femmes ? Et que se serait-il passé si Jésus avait été une femme ou une personne non binaire ?
Ces questions sont abordées de manière divertissante par Shelly Silver dans Girls/Museum (2020) et par Rosa von Praunheim dans son documentaire expérimental Männerfreundschaften (Amitiés masculines) (2018). Tous les deux n'hésitent pas à remettre en question avec curiosité et naïveté nos soi-disant « monuments » nationaux, nos Goethe et Schiller, nos Dürer et Cranach.
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