Auteur: Ralf Summer Locateur (Anglais): David Creedon Voix de femme haut-parleur (Anglais): Louise Hollamby Kühr
I’m weak, weaker, weaker, strong
I’m close, closer, closer, far
Oum Shatt, « Play »
A08
À l'évocation du terme « A8 », les Allemand.e.s pensent à l'un des axes est-ouest les plus importants du pays, la fameuse autoroute n° 8, qui est aussi tristement célèbre pour ses risques routières. Le nom A08, premier projet que nous présentons dans le Popcast de la nouvelle année, n'est pourtant pas inspiré de son homonyme autoroutier, malgré l'élément de liaison indéniable du duo berlinois, mais est une abréviation de leur projet précédent, Africaine 808. La référence fonctionne néanmoins. Dirk Leyer et DJ Nomad travaillent avec des artistes du Ghana, de Colombie, du Kenya et d'Allemagne pour donner vie à leur projet de musique électronique mondiale. Le mélange de reggae, de jazz, de folklore caribéen et d'électro qui en résulte et qui vient de paraître sur le label downbeat munichois Compost sous le titre Waiting for Zion, séduit par sa polyvalence, mais qui constitue en même temps sa faiblesse sur la longueur de l'album : A08 s'apprécie mieux si l'on considère chaque morceau pour lui-même.
Mary Ocher
L'artiste avant-pop Mary Ocher a une discographie extrêmement remarquable et variée et se tourne résolument vers la musique électronique dans son dernier album Approaching Singularity : Music For The End Of Time. L'artiste, qui a grandi à Tel Aviv et réside depuis de nombreuses années à Berlin, a produit un essai pour accompagner le titre apocalyptique de son œuvre, dans lequel elle réfléchit à l'avenir de l'humanité dans un monde en proie à des tendances autoritaires, des extrêmes politiques et des technologies en pleine expansion. Sa voix aussi forte que polarisante s'engage dans des débats sur l'autorité, l'identité et le conflit, et laisse ses visions d'un avenir meilleur s'étendre bien au-delà de sa musique.
Bernadette LaHengst
Sur Visionäre Leere, la « musicienne pop dissidente » Bernadette LaHengst se penche également sur des questions d'avenir. Le changement climatique et les changements structurels, la guerre et la politique sont autant de thèmes abordés que sa propre relation mère-fille. Sur sa nouvelle chanson Gib' mir meine Zukunft zurück (Rends-moi mon avenir), elle laisse à sa fille de 19 ans, Elle Mae (Hengst), le soin de chanter le refrain. Le résultat est un autre des hymnes pop optimistes et combatifs qui ont fait la réputation de Bernadette LaHengst depuis qu'elle a fait son entrée sur la scène musicale allemande au début des années 90 en tant que chanteuse et guitariste du groupe pop hambourgeois Die Braut Haut ins Auge.
Quasiment seule, LaHengst a composé, joué et produit sa pop soul avec une telle compétence qu'on lui pardonne quelques faiblesses textuelles et ses intermèdes de rap qui donnent envie de rentrer sous terre. On peut toutefois douter que la guitare de voyage Vox Apache, fièrement présentée sur les photos de presse, soit même présente sur l'album. Plus que dans les productions précédentes, l'objectif semble avoir été la perfection musicale.
Beirut
And we had so many plans
Leap from the sill, see where we land
Beirut, « So Many Plans »
Zack Condon alias Beirut, désormais également établi à Berlin, est depuis 2006 déjà une bonne adresse pour l'indie-folk avec des éléments de musique du monde et de jazz. En 2019, alors qu'il s'installait pour un temps sur une île de Hadsel, en Norvège, en quête de tranquillité, il a découvert un « orgue à pompe » dans la maison qu'il louait, et qui est devenu l'inspiration du son de sa nouvelle production. De retour à Berlin, il a dû s'enfermer pour cause de pandémie et a pu terminer tranquillement la production de l'album portant le nom de Hadsel, tout seul, comme il l'avait fait pour son premier album il y a presque 20 ans, dans le style éprouvé de DYI. Bien sûr, il est devenu magnifique, plein de calme contemplatif et de magnifiques sons organiques des instruments de l'extraordinaire collection de l'artiste ainsi que son merveilleux baryton typique.
Oum Shatt
Le supergroupe allemand Oum Shatt annonce de grandes choses, six ans tout de même après la sortie de leur fantastique premier album Gulag Orkestra. Surf américain, rembetiko grec, no wave et diverses influences orientales sont les pierres angulaires de leurs nouvelles chansons, qui sortiront le 26 janvier.
Menés par les passages vocaux en forme de mantras de l'auteur-compositeur-interprète Jonas Poppe et par les percussions parfois sauvages du batteur Chris Imler, ils créent à nouveau un son très personnel malgré leurs multiples influences. Un début fort pour une année qui ne sera certainement pas de tout repos.